dimanche 7 août 2011

American Tabloid (James Ellroy)

Pavé d'été (ou pavé d'hiver), bonjour !

Ce livre de James Ellroy, s'inscrivant dans une trilogie "Underworld USA", couvre de 1958, où JFK est sénateur, au décès de ce dernier...

Hybride entre polar et livre-historique-révélation, American Tabloid est sans conteste signé Ellroy. Dans tous ses bons et ses mauvais côtés.

Les cinquante premières pages sont absolument affreuses. Elles donnent envie de s'arrêter là. Excessivement dense et promettant une lecture laborieuse, l'introduction essaie de planter le décor dans la mafia des années 50 à travers un horrible argot, l'omniprésence du sexe dépeint salement et vulgairement par des personnages qui le résument à ça, et toutes les caricatures des polars noirs comme dans le Dahlia Noir.

Malgré tout, quinze ans de bonnes critiques m'ont donné envie de continuer. A raison.

American Tabloid est avant toute chose un roman qui s'apprivoise et qui ne supporte pas d'être délaissé. Un peu d'inattention, et c'est un détail crucial, une alliance essentielle, un revirement de situation ou un plan politique machiavélique que l'on rate. Il y a une quantité absolument insupportable de personnages, qu'ils soient réels ou fictionnels... mais chacun d'eux joue un rôle crucial, nécessairement, même si parfois éclair.

C'est un projet ambitieux: écrire l'administration Kennedy et l'enchevêtrement de conflits (ou convergence) d'intérêts qui gravitent autour. Mafia, CIA, communisme, anti-communisme, monde des affaires. Tout se mêle. Toutes ces organisations dont on sait qu'elles sont de près, de loin, et indirectement mais sûrement liée à la politique jouent moult doubles-jeux, à travers tout autant d'agents doubles. Mais Ellroy écrit cette administration en restant avant tout ce qu'il est: un auteur de polar.

Se mêlent alors la vérité et la fiction. La complexité de personnages tels que Kemper Boyd, qui travaille pour Hoover en espionnant les Kennedy, travaille pour les Kennedy en espionnant Hoover, et travaille pour lui à l'aide de la mafia et de la CIA pour éliminer les frères Castro, ou de Pete Bondurant, un Français dont on ne comprend pas finalement bien ce qu'il fait là, et enfin Ward Littell, le plus emblématique du désordre idéologique qu'incarnent tous ces milieux.

La partie "histoire" est grandement menée. Détaillée. Précise. Et la partie polar tout autant. On s'y prend. On halète. La fin de l'Histoire, on la connait. Kennedy meurt, le coup d'Etat de la Baie des Cochons échoue. Pour autant, on se demande, on y croit, on tremble avec tous ces hommes. Et surtout on plonge toujours plus profondément avec eux dans ce "merdier" inextricable, cette chienlit politico-mafieuse dont on ne revient pas, et que finalement, on ne peut combattre.

Il faut lire American Tabloid. Pour voyager quelques 800 pages dans un monde dont on ne regrette plus de ne pas le connaître.

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