mercredi 28 décembre 2011

Rubrique Mascara

J'ai dernièrement eu l'occasion de tester différents mascaras dont je vais m'efforcer de parler au mieux :

- le mascara parfait pour les yeux sensibles : le lash-power mascara de Clinique. Coûtant 23e (soit un peu moins qu'un mascara de grande marque classique) il ne jouit, le pauvre, que d'un tube absolument affreux. Il travaille la longueur tout en naturel. On sent bien sa texture strech, mais au final, on ne voit pas qu'on porte du mascara. Le regard est souligné, les cils réellement allongés et légèrement étoffés, mais dans un naturel rarement égalé. Quand on a les yeux irrités, sa texture n'agresse pas du tout. Il convient surtout aux jeunes femmes que les démaquillants irritent : en effet, il se dissout dans l'eau chaude. Il faut qu'elle soit très tiède : des larmes de crocodile ne le font pas fondre. En revanche, il est un peu fastidieux à ôter : l'eau l'effrite et il faut attendre de bien l'avoir enlevé. En somme, c'est un mascara idéal pour les yeux fragiles, ou celles qui aiment se démaquiller sous la douche.

- le brushing de cil : avec le Diorshow 360, qui coûte très cher (35 à 40e). C'est l'ultime gadget make-up : un mascara dont la brosse tourne toute seule (dans le sens des aiguilles d'une montre et dans le sens inverse pour permettre de maquiller les cils du haut, du bas et des deux yeux). Je n'aime pas les mascaras Dior et celui-ci n'y coupe pas. Texture pâteuse, la brosse automatique me déçoit : elle n'apporte rien de bien extraordinaire, ni en volume ni en longueur. Elle est pas mal pour souligner les cils du bas qu'elle recourbe un petit peu (comme ils sont fins et légers) mais est insuffisante pour les cils du haut. C'est vraiment, à mon sens, de l'argent gaspillé.

- l'effet travaillé : le Volume Effet Faux-Cils Shocking YSL (28e50). Je salue particulièrement les couleurs : déclinées autour de noirs légèrement teintés (noir jade, noir cendre, noir bronze, noir burlat, noir abysses) elles offrent des reflets discrets qui illuminent et colorent le regard tout en subtilité. Comme son grand-frère l'Effet Faux Cils, il a une texture très épaisse, et même encore plus crémeuse. Quand la brosse sort du tube, on se demande qu'en faire, et il faut quelques applications pour ne pas en mettre partout ailleurs que sur les cils. Contrairement à l'Effet Faux Cils, il offre un vrai effet travaillé. Il étoffe considérablement le volume, la longueur, et épaissit les cils. "L'ennui", c'est qu'il donne un regard très maquillé, et ne conviendra pas à celles qui souhaitent quelque chose de plus délicat. Je pense que comme son grand-frère il sèche vite en revanche. A confirmer.

- le mascara aux mille lumières : Volume Million de Cils Luminizer de l'Oréal (environ 17e). Lumière, lumière, je te cherche dans ce mascara. En effet, au démaquillage, on voit bien qu'il y a plein de petites paillettes, mais elles ne se voient pas sur les cils, même pas jeu de lumière. L'option "luminizer" n'apporte donc rien. En revanche, Million de Cils est un super mascara, malgré une texture un peu sèche qui peut gratter les yeux. La brosse à picots en plastique est très facile à utiliser et permet vraiment d'éviter les paquets. Le mascara n'allonge pas vraiment, mais il recourbe un petit peu les cils et leur donne un bel effet frangé. D'autant qu'il semble vraiment les démultiplier sans effet épaissi comme chez YSL.

Eyes Lips Face (E.L.F) Eye-Liner Crème et Pigments pour les Yeux

J'ai cédé... et j'ai commandé.

Tout d'abord, les Eye-Liners Crème (4 euros). Je les ai commandés en "gunmetal" et en "ivory". Les deux rendent très différemment, si bien qu'on dirait des produits différents. Avant tout, je dois souligner que le packaging en petite boite carrée transparente à bouchon noir est très sympa. L'eyeliner arrive ainsi avec un petit pinceau : cela donne quelque chose d'assez classe, ce qui est toujours un plus pour un produit "cheap".


La texture n'est pas très crémeuse : on dirait en fait plus une ombre à paupière qui aurait pris l'eau. Ce compact est d'ailleurs assez difficile pour se saisir du produit sur le pinceau. D'ailleurs l'application est délicate : soit cela marque trop, soit cela ne prend pas, ou alors le produit s'effrite. Avec un peu de patience (et c'est beaucoup plus facile de tracer le trait sur une ombre à paupière) on arrive cependant à un joli résultat. Pour ma part, je dois quand même passer par l'utilisation d'un autre pinceau.

Le version ivoire prend beaucoup facilement que la version gunmetal sur la paupière. J'étais un peu dubitative sur mon choix de couleur. Sur une ombre à paupière grise, c'est assez original, et ça donne un regard frais.



J'ai aussi tenté les pigments (4 euros également). J'avais peur qu'ils ne ressemblent trop aux ombres à paupières minérales qui m'avaient beaucoup déçue sur la tenue, la texture trop pailletée, et rien que sur l'insupportable tamis. J'ai été agréablement surprise. Déjà, le packaging, commun à celui de l'eyeliner crème est bien plus agréable que celui des ombres minérales. Cela fonctionne également sur un système de tamis, mais beaucoup plus efficace que celui de la gamme minérale. C'est sûrement à mettre au compte de la texture plus épaisse de la poudre à paupière. J'ai opté pour la couleur "Breezy Blue", qui est un bleu-gris foncé légèrement scintillant (mais pas du tout pailleté contrairement à ce que semble indiquer l'image contractuelle). Le produit est assez épais, ce qui, si on l'utilise avec parcimonie, rend l'application relativement aisée à travailler au pinceau. L'intensité de la couleur est vraiment impeccable, et c'est un avantage certain sur le produit concurrent chez l'Oréal, Color Infaillible.




Routine de teint !

La base de tout maquillage, c'est bien évidemment le teint. Si on se maquille les yeux avec de l'ombre, il se doit d'être véritablement impeccable, sous réserve de quoi il apparaîtra encore plus imparfait que ce qu'il n'est réellement.

Personnellement, je n'ai pas vraiment une mauvaise peau. Quelques irrégularités et des sillons d'expression très marqués. Par période, ma peau fait des sortes de petits granulés qui la rendent irrégulière, et j'ai parfois quelques rougeurs sur le haut des pommettes, mais pas de problème de brillance, de boutons ou de pores apparents. En soi, ma routine teint consiste plus à corriger ma couleur que l'aspect de ma peau en lui-même. En revanche, j'ai la peau très sèche, voire qui pèle sur la zone T (je suis faite à l'envers) et ça, ça ne pardonne pas.

Evidemment, avant toute chose, il convient de bien se nettoyer. La peau produit beaucoup de toxines la nuit afin de se reconstituer. Il faut donc ôter ce voile impur. Idéalement, il faudrait utiliser une mousse nettoyante (j'ai rencontré une conseillère Shiseido qui m'a bien expliqué qu'il ne faut en aucun cas utiliser des mousses désincrustantes : elles agressent la peau et la rendent plus productive de sébum). Grande feignante, je me contente d'un coton de lotion. 

J'utilise une lotion LCBio qu'on peut trouver en institut : l'eau des champs au coquelicot, qui coûte 23e40. Je l'aime bien car elle est fraîche et depuis que je l'utilise, je constate que j'ai meilleure mine. Néanmoins, l'odeur de coquelicot me gêne. J'aime bien l'idée que ce soit un produit naturel, et dans l'ensemble tous les produits de cette marque me plaisent.
Eau des Champs au Coquelicot, LCbio 23e40 environ, photo empruntée au blog http://beaute-vanite.blogspot.com

Après, il faut bien évidemment s'hydrater : c'est une étape majeure, surtout pour une peau comme la mienne qui risque de peler sous le fond de teint (et il n'y a rien de pire). J'utilise, le matin, la crème Hydrazen de Lancôme. Elle convient bien à ma peau sensible le matin, mais n'a pas une hydratation suffisante (mais en version peau sèche) pour que je l'utilise également le soir. Elle est relativement chère (environ 53e) mais elle s'étale facilement. Ainsi, une pointe suffit. Elle donne un aspect un peu brillant à la peau, bien qu'elle ne la graisse pas cependant. J'ai les yeux sujets aux poches et aux cernes, surtout le matin. J'ai essayé environ tous les produits possibles, et pour le moment, le mieux que j'ai trouvé est l'Hydrazen Neurocalm de Lancôme sur lequel j'écrirai postérieurement.

Arrive l'étape maquillage à proprement parlé. Trois chemins s'offrent alors : un simple peu de poudre, une crème hydratante teintée ou du fond de teint. Au quotidien, j'opte le plus souvent pour les deux premières solutions.

Un voile de poudre permet d'unifier le teint et de donner un meilleur fini à la peau. Mais même avec une belle peau il n'est pas forcément suffisant quand on utilise des couleurs, surtout foncées, sur les yeux.

Crème de soin teintée Clarins, env 30e
La crème hydratante teintée est une très bonne alternative : elle donne bonne mine tout en assurant un confort non-négligeable et floûte plutôt bien les imperfections. J'utilise la crème de soin teintée de Clarins. Elle coûte 30 euros, ce qui peut paraître onéreux. Néanmoins, il faut en mettre très peu. Elle peut effrayer car la couleur à la sortie du tube est foncée même sur les teintes les plus claires. Mais elle se fond très bien sur la peau, et si la teinte est bien choisie, ne fait pas du tout effet "tombée dans le pot d'autobronzant". Elle donne un joli fini à la peau, dont on sent bien que l'élasticité est travaillée. Au final, le rendu est très naturel et le teint rehaussé, plus pimpant. Le seul bémol, en dehors du prix, c'est l'odeur : elle sent les plantes (les produits Clarins sont travaillés d'après des extraits de plante). Attention : ce n'est pas parce que c'est une crème qu'il ne faut pas prendre le temps de se démaquiller le soir. La crème, comme la poudre, comme la simple pollution et comme bien évidemment le fond de teint, obstrue les pores. Sans un nettoyage quotidien avant de dormir, la peau ternit et étouffe. Selon les jours, j'utilise tout de même un anti-cerne sous la crème Clarins que je camoufle en passant la crème sur les yeux.

Base de teint Body Shop - 16e
L'autre option ouverte est l'option tout combat : le fond de teint. C'est ma "routine" des jours où ça ne va pas du tout, des jours (soirs) où j'ai décidé d'être très maquillée, bref : du pas quotidien. Du coup, je tiens à bien le faire. Un fond de teint sans base de teint au préalable tiendra mal, et rendra mal. Il ne faut pas voir la base de teint comme "une couche en plus", mais comme un outil de naturel. Elle floûte vos imperfections, rides, ridules, et permet au fond de teint d'accrocher uniformément sans s'échapper au fil de la journée dans les commissures (créant ainsi l'effet plâtre). Il en existe plusieurs : certaines sont neutres et conviennent ainsi à toutes les peaux, d'autres ciblent un problème particulier (rougeurs, pores...). Make-Up Forever propose la gamme la plus large de bases.  Personnellement, j'utilise une base Body Shop que je trouve très bien, et qui est raisonnable (16e). J'ai eu l'occasion de tester une fois une base La Prairie, et clairement, cette dernière rendait ma peau bien plus belle, avant même le fond de teint. Mais à 80e le petit pot, on se contentera de Body Shop et de sa base de teint matifiante à 16e.

MUFE HD Concealer - environ 24e
L'étape inévitable, c'est l'anticerne. Chez moi, les poches sont marquées (et les éclairer permet de les faire oublier par effet d'optique) et en plus sombres. Le meilleur anticerne que j'ai trouvé pour le moment est un Make-Up Forever, très épais (comme leurs fonds de teint) mais qui ne plâtre pas du tout le teint (comme leurs fonds de teint aussi), le HD High Definition Concealer. Il coûte 24e50, ce qui le place très bien dans les produits de haute-parfumerie. Alors qu'il couvre bien, il a vraiment un rendu invisible. Choisi dans une teinte bien adapté, il peut même se passer de poudre dessus pour cacher le raccord. En revanche, il opère moins bien la fonction enlumineur (puisqu'il est là pour couvrir), pour laquelle il vaut mieux alors acheter un produit dans le genre Touche Eclat d'YSL, que personnellement je n'aime pas. Dans ce domaine, je préfère largement le Teint Miracle Lancôme. J'ai aussi trouvé un petit quatuor Sephora à 12 euros vraiment très bien (mais pour corriger les imperfections plus que pour corriger mes cernes récalcitrants). 

J'ai alors plusieurs fonds de teint qui présentent tous des aspects différents : 

- le Gemey Maybelline Dream Mat Mousse, qui donne un joli fini poudré. Il a une texture mousse assez agréable, avec un côté vraiment poudré sur la peau. Il faut le travailler aux doigts pour bien l'étaler, et il n'y a pas besoin de beaucoup de produit. L'ennui quand on a la peau sèche, c'est qu'il faut faire attention à ne pas appuyer trop fort pour ne pas faire ressortir l'aspect sec et pelé de la peau. Il est je pense très bien pour les peaux mixtes à grasse, mais à déconseiller aux peaux sèches. Dans l'ensemble, son fini très poudré le rend assez figé : tout dépend de l'effet que vous recherchez. Il n'est pas très lumineux mais offre un teint parfaitement mat et uni (environ 17e)


- le Teint Innocence Compact de Chanel : c'est un des rares que j'ai trouvé qui m'offre exactement ma couleur de peau avec Pétale, qui est clair, mais ne tire pas sur le rose ou sur le jaune. Il est compact (à appliquer à l'éponge), mais un peu gras dans la texture, ce qui le rend très agréable à l'application. Il ne pose pas le problème du Dream Mat Mousse d'accentuer la sécheresse de la peau, et il offre un très joli fini, naturel et lumineux, relativement mat. Il tient très bien dans la journée, mais il faut le fixer avec une poudre pour lui donner un effet naturel. En tout cas, il est très facile à appliquer  (environ 47e la première boite, puis 34e la recharge).


- L'Infinité Hydration Calvin Klein : Introuvable en magasins spécialisés, il est très souvent dans des ventes privées ou des magasins de dégriffe Make-Up, où on le trouve pour environ 12e. Le packaging est sympa, et le produit assez gras. Ce n'est pas un problème pour ma peau sèche, mais il faut vraiment le matifier avec une poudre pour ne pas ressembler à une frite à la sortie d'un bac Qwick. D'ailleurs dans le flacon, il a tendance à se scinder entre la partie huileuse et la partie solide. Il faut donc le secouer régulièrement pour ne pas avoir l'impression d'avoir un produit chimique non-identifié abandonné dans la salle de bain. La gamme de couleurs est assez sympa, et pour le prix, il est vraiment de bonne qualité. A conseiller donc aux peaux sèches pour environ 12e.


- Le Teint Idole de Lancôme : un fond de teint fluide sur lequel je n'ai rien à redire. Agréablement à porter, confortable, qui tient parfaitement toute la journée, il a un beau fini parfaitement naturel (environ 40e).



- Le Perfect Touch Radiance d'Yves St-Laurent : Mention spéciale au packaging pinceau intégré. J'avais peur que ce soit un peu gadget, mais le pinceau est très bien (même si le débit est assez fort : il faut donc verser sur la main et prendre avec le pinceau, il ne fonctionne pas comme un Touche Eclat où le produit monte dans les poils du pinceau). Il a une texture très légère et très fluide, mais offre une belle couvrance. Une large gamme de couleurs est offerte : elles se détachent des couleurs réelles de peau, mais elles ont un joli éclat qui donne vraiment bonne mine et bonne couleur. Un peu plus cher (40e environ) c'est vraiment le genre de produits qu'on pourrait utiliser tous les jours.


Pour un joli fini, il faut fixer le tout avec une poudre. Celle-ci doit être appliquée légèrement, en mouvements circulaires, de l'extérieur vers l'intérieur afin de ne pas perturber les petits poils du duvet des joues. Jusqu'ici, j'utilisais une poudre Sephora très bien, mais je vais bientôt en tenter une autre sur laquelle je reviendrai.


jeudi 20 octobre 2011

(The Artist) (Michel Hazanavicius)

On a fait beaucoup de bruit autour de The Artist dont il faut convenir que la recette était osée. Réaliser un film muet pour se moquer en apparence du muet, mais qui en fait, par son existence même qui capte le spectateur réhabilite le muet, c'est tout un imbroglio difficile à expliquer !

Mais c'est la première des qualités de Michel Hazanavicius dans sa réalisation. A aucun moment il ne défend le muet. Pas d'argument, pas de démonstration scénaristique. Rien d'autre que la preuve par elle-même : faire regarder 1h30 de film en noir et blanc sans aucune parole (et seulement deux scènes de 10 secondes de bruitage) ni aucun son autre que la musique à des spectateurs des années 2000 habitués au dolby-surround, à la HD et même au 3D. C'est l'humilité même du raisonnement qui lui donne toute sa puissance.

L'histoire est simple: déchéance d'une star du muet à l'avènement du parlant, remplacé par une nouvelle génération d'acteurs.  Morale de l'histoire : le muet n'est pas complètement mort puisque c'est lui qui raconte le succès du parlant.


En revanche, un véritable univers se dégage : on retrouve le cadre du Hollywood que tous les films de et  sur son âge d'or ont inscrit dans notre imaginaire collectif (on retrouve d'ailleurs des décors communs au Dernier Nabab avec Robert de Niro) et le cadre général des années 30 américaines, grâce notamment à la reprise des techniques d'image de l'époque : maquillage, types de plan entrés dans notre inconscient (contreplongée sur le côté sur le visage féminin tourmenté, fameux plan de la personne dans la voiture qui espionne, scène de folie avec les ombres...).


Le film reprend tous les codes cinématographiques de l'époque... et les acteurs en font de même. Cela met une double difficulté à leur charge : travailler l'expression pour qu'elle se suffise à elle-même puisqu'ils ne parlent pas comme les héros du muet, et adopter la gestuelle des premières stars du parlant. Jean Dujardin et Bérénice Bejo offrent une prestation incroyable ! Certes au début, Jean Dujardin ressemble un peu trop à Jean Dujardin : son jeu d'assurance rappelle à la fois Loulou, Brice de Nice et OSS 117. En même temps, travailler l'assurance un peu comique très jouée par le visage est sa marque de fabrique. Passé ce premier cap, il se fait oublier et devient vraiment son personnage (George Valentin). Bérénice Bejo est absolument incroyable... Elle irradie de beauté à l'écran (telle les grandes des 30's-40's) et de charme frais.

Il faut aussi citer Uggy le fantastique petit chien du film (qui a reçu le "Dog d'Or" à Cannes) qui offre lui aussi une très jolie prestation pleine de charme et de malicité !

The Artist sait rester subtilement drôle sur le monde du cinéma tout le long, et en même temps, Jean Dujardin communique parfaitement bien le mal-être de son personnage déchu. Et malgré tout cette traversée du vide que l'on accomplit avec lui, la scène finale fait sortir léger, heureux, et plein d'une bonne humeur à la Fred Aster (à qui il est fait un très gros clin d'oeil à la fin du film). Et un film qui rend heureux, ça se souligne !


jeudi 6 octobre 2011

(La Délicatesse) (David Foenkinos)

J'ai lu La Délicatesse, et je l'ai lue avec mon regard à moi, celui d'une personne à qui on raconte une histoire similaire à la sienne. Alors je l'ai perçue comme je ne l'aurais sûrement pas perçue avant. J'ai tendance à croire que les endeuillés prématurés (ceux qui ont enterré ces êtres qui n'avaient pas l'âge de mourir) forment une catégorie de population à part, qui voit, vit, et comprend les choses différemment des autres.

J'ai décidé de lire certaines critiques sur ce livre, ce que j'évite de faire avant d'écrire la mienne, justement pour voir ce que les autres, les "normaux" en pensaient. J'ai lu que les procédés étaient faciles, que l'histoire était mièvre, que c'était un amalgame de pathos.

L'histoire que raconte Foenkinos est celle d'une jeune veuve qui n'a pas trente ans au décès soudain de son mari dans un accident de la circulation.

Justement, toute la réussite de La Délicatesse est d'être capable de suivre ce deuil avec simplicité (et avec délicatesse... seul point - d'ailleurs - du roman où le titre est approprié). On passe sur toute la période de choc, sur tous les moments de désespoir. On évite les interrogations sur la vie, les questionnements compliqués sur la mort, sur demain, et sur les jours d'après. En fait, Foenkinos passe court sur tout le travail de deuil. C'est sans doute ça qui a empêché les auteurs des critiques que j'ai lu d'apprécier tout cette délicatesse. Parce que cette peinture de la mort ne ressemblaient pas à celle qu'il attende, celle plus théâtrale que la vraie, mais aussi, celle plus facile. 

C'est avec finesse et pudeur que Foekinos parle, à peine, de ce deuil, qu'il replace dans ce qui prend le pas sur lui : le cours de la vie. On sait de Nathalie qu'elle ne vit pas - et ne vivra plus jamais - comme les autres gens. Mais elle vit. Elle se lève, elle travaille, et elle ne pleure pas. Ce qu'on peut retenir de Foekinos, c'est qu'il a toujours le bon mot pour tout ça, le mot léger, enlevé, délicat donc, et juste.

Le livre se concentre en fait plus sur la nouvelle histoire d'amour de Nathalie. Peut-être qu'elle est caricaturale. Je ne l'ai pas vraiment lue ni comprise. C'était d'autres thèmes qui retenaient mon attention. Mais de ce que j'en ai perçu, c'était joli. Mais plutôt que délicat, fin ou léger. D'ailleurs, j'aurais plus volontiers intitulé le livre La Finesse ou La Légèreté.

La prouesse de Foenkinos, c'est aussi son art pour la digression et sa passion pour l'anodin. Tous ces petits détails inutiles et savoureux qu'il insère au milieu de son récit (souvent dans les moments plus sombres) comme pour rappeler que ce sont par les petits riens qu'on reste suspendus à la vie, et que ces petits riens sont peut-être plus efficaces partenaires de deuil que les humains.

De Nathalie, on retient beaucoup plus sa fragilité que son malheur. Certes c'est le malheur qui en est la cause, mais l'auteur nous guide vers une vision d'elle non en tant qu'endeuillée, mais en tant que femme. Et Foenkinos exprime bien cette paradoxalité de la veuve qui ne veut plus qu'on la désire en tant que femme et à qui les regards masculins indélicats apparaissent souvent peut-être plus libidineux qu'ils ne le sont, et qui en même temps souffre de cette image de veuve, de personne que l'on ne peut regarder, à qui l'on ne peut parler, comme si la malédiction de ce qu'elle vit allait rejaillir sur son interlocuteur. Il entraîne le lecteur à regarder Nathalie en tant qu'être humain (plus qu'en tant que femme d'ailleurs), en tant qu'âme à aimer, tout en soulignant l'inappropriation des regards "bout de viande", comme celui de Charles, son supérieur hiérarchique, dont, du coup, toutes les avances échouent, alors que celles de Markus, avec toute son humanité et sa tendresse finit par obtenir de Nathalie qu'elle lui laisse une chance.

La Délicatesse est donc, selon moi bien sûr, un livre très juste et qui n'a au contraire pas cédé à la facilité. Car traiter le deuil en restant léger, c'est là le douloureux exercice quotidien de tous les endeuillés, et Foekinos le traduit très joliment en mots. Un film avec Audrey Tautou réalisé par l'auteur et son frère sortira normalement à la fin 2011.

jeudi 29 septembre 2011

(Habemus Papam) (Nanni Moretti)

Habemus Papam a beaucoup fait parler de lui au moment du Festival de Cannes 2011. Nanni Moretti y réussit le prodigieux exploit de réaliser un film drôle qui n'est pas une comédie. C'est un film entre mélancolie, burlesque, ironie; tout en subtilité.

Un nouveau Pape est élu. Mais cet homme est en proie aux affres de la dépression. Plombé par le manque de confiance en lui-même, il se liquéfie devant la tâche qui lui incombe, et qu'il tient pour majeure.

Tout l'intérêt du film réside dans cet oscillation perpétuelle entre les registres. Ce pourrait être grave, sérieux. Le film commence d'ailleurs ainsi, plein d'austérité. Mais le huis-clos du conclave laisse tout de suite à la dérision. Presqu'à l'auto-dérision d'ailleurs, mais une auto-dérision involontaire - du moins inconsciente - de l'Eglise.

Les cardinaux, prisonniers de la rigidité de leurs institutions, ne savent comment réagir à cette situation qui remet en cause la raison même de l'existence de l'Eglise : si le Pape n'est pas prêt à être Pape, il est tout de même réputé avoir été élu par Dieu qui a "soufflé" aux cardinaux leur vote. Il ne peut donc ne pas être intronisé. Sinon, c'est remettre en cause l'existence même de Dieu, et, en tout cas, d'une Eglise qui ne serait qu'en fait qu'une organisation oligarchique injustifiée. On sent tout le long que les cardinaux sont tentés par une solution que le huis-clos secret leur offre : celle de recommencer l'élection. Mais s'écarter - même pour le bien de l'Institution - des règles établies, c'est ouvrir eux-mêmes pour eux-mêmes une brèche dans l'inébranlabilité de leur foi.

On a d'ailleurs beaucoup lu ou entendu dans diverses critiques qu'Habemus Papam était un film sur la crise de foi d'un Pape. C'est faux. A aucun moment ce Pape ne remet en cause Dieu. Au contraire. Mais son mal remet en cause l'Eglise qui n'a pas la souplesse de l'accepter. 

Le film met en exergue le piège que s'est tendue l'Eglise à elle-même : en fondant la justification de son existence sur des concepts qui refusent la psychologie, elle a créé son propre talon d'Achille. Car à la moindre apparition irréfutables des problèmes de l'inconscient (qui seraient inconciliables avec l'âme), cette justification se trouble ébranlée. En filigrane, si l'Eglise avait su être plus souple avec les concepts post-Freudiens, elle serait plus solide, et pourrait plus facilement se rapprocher du peuple, celui des gens qui sont dépressifs, qui consomment des psychotropes et vont chez des psychanalystes, sans pour autant ne pas être croyants.

Et Moretti s'amuse avec cette déconnexion naïve, avec l'isolement des pontes de l'Eglise du monde réel. Le huis-clos du conclave, où un psychiatre athée (joué par Moretti lui-même) se retrouve enfermé avec les cardinaux, lui offre la possibilité de s'amuser, comme le fait son personnage.

On découvre de vieux messieurs complètement perdus parce que la réalité s'éloigne d'un pouce des règles formelles et solennelles qu'ils connaissent. De grands enfants attendrissants qui se gavent de somnifères (comme tout le monde) tout en refusant le concept d'inconscient, de moi, de ça, et de sur-moi. Et le psychiatre joue avec eux, leur organisant des tournois de volley impromptus qui les sortent de leur austérité, alors que le directeur du Vatican peine à maintenir les apparences et s'échevine à raisonner un Michel Piccoli fugueur.

Il y a le côté sérieux, et le côté drôle du film. Et il y a aussi le côté sombre. Celui de la dépression de Piccoli. Une dépression comme l'on en croise chaque jour, à chaque coin de rue, à la machine à café, que ce soit celle d'une université ou d'une grande entreprise, à l'étage des cadres ou dans le local ménager. Ce mal du XXème siècle. Cette lassitude, cette mélancolie, cette "non-envie" (plutôt qu'une envie de rien) permanente et ce cruel manque de confiance en eux qui laissent les gens éteints. On a jamais autant parlé de la dépression, qui n'est plus vraiment un mal tabou: saisonnière, continue, légère, profonde... mais elle est bien partout (et (mal) automédiquée comme le font les cardinaux à grand renfort de somnifères).

Piccoli est troublant de vulnérabilité. Incroyablement juste. A la fois curieux de son mal, et plein d'incompréhension à son égard. On vit avec lui tout le poids de ce mal, qui n'est pas vraiment une douleur, tout juste une tristesse, et qui l'écrase.

Moretti ne manque pas, au passage, de se moquer de la psychanalyse et de ses travers. Médecins qui se battent sur l'appellation des symptômes, ou leurs causes et orientent le patient vers leur dada d'études ("carence de soin" revenant souvent), crises d'égo des psychiatres qui ne savent eux-mêmes pas gérer leur vie... C'est finalement, extérieurement à l'Eglise, tout le monde vrai qui y passe : les maladies, les remèdes, les malades et leurs traitants.

L'exploit d'Habemus Papam reste de nous faire ressortir légers, comme après une comédie, sans jamais n'avoir fait de blague. C'est la comédie de la vie qui s'est jouée, la mise en scène qui nous a fait sourire plus que le bon mot. 

C'est le jeu de la subtilité qui a parlé.

dimanche 18 septembre 2011

(Présumé Coupable) (Vincent Garang)

Présumé Coupable est l'un de ces horribles films qui touchent au plus profond de soi, directement aux tripes. Retraçant l'histoire d'Alain Marécaux, l'un des 13 d'Outreau, l'huissier qui avait entamé une grève de la faim, il nous plonge dans l'univers carcéral et dans tous ses à côtés.

L'histoire tout le monde la connaît. Ces enfants et leurs parents qui accusent de viol treize personnes (en fait, plus d'une cinquantaine, mais seules les accusations contre ces treize là resteront tangibles) qu'on envoie en détention préventive, durant trois longues années, dont on place les enfants dans des familles d'accueil (leurs véritables familles pouvant les influencer en faveur de leurs parents), et que les médias surexposent.

Le film est humainement parfaitement juste. Philippe Torreton offre une interprétation absolument extraordinaire. Il est Alain Marécaux, tâche d'autant moins aisée que ce petit huissier au crâne rasé est presque quelqu'un qu'on connaît, tant il a été l'un des emblèmes des prévenus d'Outreau. Sa transformation physique, effrayante, digne de celle de Tom Hanks pour Philadelphia (une perte de plus de 20 kilos), entraîne d'autant plus le spectateur dans la spirale infernale de la dépression, de l'incompréhension, du suicide.


Qu'il est gênant de voir cet homme enfermé entre quatre murs, et enfermé en lui-même, presque comme une personne psychiatriquement malade, parce qu'on refuse de l'écouter, comme si sa réalité à lui n'était pas la réalité des autres. Ses quatre tentatives de suicide, qui semblent (selon l'orientation du film, elle-même fondée sur le récit d'Alain Marécaux) plus révéler une vraie volonté de mourir qu'un appel au secours, n'alertent pas les autorités carcérales ou judiciaires. L'homme n'est pas encore jugé coupable. Il est en détention préventive, une mesure censée être exceptionnelle et justifiée par la nécessité d'isoler le prévenu pour le bienfait de l'enquête. Quand la prison et l'opprobre publique deviennent un tel supplice pour une personne qui est toujours réputée innocente, ne devrait-on pas lui laisser une chance au dehors, quitte à "délocaliser" la personne des lieux de l'enquête ? Ou à la placer, comme il fût fait quelques semaines avant que le juge ne redemande le placement en prison, dans une institution médicalisée ?

On devient Alain Marécaux. On prend sa douleur, son enfermement, l'incompréhension qu'on lui oppose, et cet énorme sentiment d'injustice (renforcé par le vrai éclatement du fond de l'affaire que nous connaissons tous). Les personnages secondaires eux aussi offrent un moment de vérité. Sa soeur et son père apparaissent très peu, mais leurs 10 minutes de jeu mises bout à bout sont autant de moments de vérité. Le décès de la mère offre au film une nouvelle occasion de montrer ses traits de justesse... Mon expérience personnelle du deuil m'offre un nouvel oeil sur les scènes de film qui l'abordent: les justes, et les moins justes (qu'elles ressemblent ou non à mon propre vécu... c'est juste qu'elles offrent ce petit quelque chose qui dit "je te comprends, je vis ce que tu vis"). Et définitivement, celle-ci fait partie des plus justes que j'aie vues.

Il est bien agréable de voir un film qui ne dépeigne pas l'univers carcéral selon le nouveau stéréotype façon Animal Factory. Alain Marécaux y est entré huissier (et les professions juridiques, notamment celles malaimées comme la sienne, y sont mal vues) et "violeur d'enfant", ce que son avocat lui a bien rappelé de cacher. Le film montre la saleté de la prison, l'inconvénient de vivre à 6 dans une cellule miteuse et minuscule, sans intimité, sans possibilité de se reposer. Mais pas de scène façon Un Prophète, juste l'horreur de la prison dans "sa normalité".

En filigrane (mais un filigrane intense), le problème typiquement bureaucrate du placement des enfants, qui sont des humains. D'ailleurs, une petite envolée lyrique (la seule) de Torreton, lors d'un jugement sur la garde des enfants, aborde ce problème de l'humain oublié par le bureau. Les enfants Marécaux, que l'on place dans des familles d'accueil, alors qu'ils ont besoin d'amour et de compréhension, qui plongent: drogue, fugues, TS, déscolarisation... illustrent ce problème bien connu, mais duquel on parle peu : le sort des enfants de ceux qu'on envoie en prison.

Petit bémol: le juge Burgaud. L'acteur lui ressemble trait pour trait. Il est presque relégué au second rôle. Il ressort arrogant et inhumain. Complètement. Cela parait presque manichéen. Pas de tentative de  justifier ses non-excuses par son propre déni (coupable) ou la peur d'être radié de la magistrature. Juste la description d'un homme qui a condamné à l'avance (ce qui est manifestement vrai) et ne s'en mord absolument pas les doigts. C'était peut-être le cas, je n'ai aucun moyen de le déterminer. Mais cela donne aux esprits critiques l'occasion de penser que le film manque un tout petit peu d'objectivité, ce qui est dommage au milieu de toute cette justesse.